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Autour de moi
Notes d'une chercheuse

Sur le créationnisme
Récemment, mon ami critiquait les créationnistes. Ils sont dangereux pour la science, car à leur avis, la science est inutile, dit-il. En particulier, des sciences comme la cosmologie ou la biologie de l'évolution. Tous comprennent pourquoi. Cependant, malgré tout, ce n'est pas si simple.

Je me suis rappelé mon propre conflit avec le creationisme. Je suis née dans une famille assez orthodoxe (chrétienne). Mes parents ne réfléchissaient jamais beaucoup sur les mécanismes de la création de l'Univers, c'est pourquoi ils suivent, sans trop chercher, la théorie biblique et croient que le monde a été créé en 7 jours.

La Bible nous dit que c'est Dieu qui a créé tout, disait ma mère. Un jour, après le déjeuner, moi, jeune cosmologiste débutante, j'ai compris que toute ma famille, les gens crédibles pour moi, ils sont des créationnistes. Et cette parenté avec ma famille a donné naissance au germe du doute : et si… S'ils ont raison ? Je me suis sentie mal à l'aise, le déjeuner est resté en travers du gosier. Voulant concilier les idées des gens qui m'ont élevée et mon travail (je vous rappelle que je suis cosmologiste), je me suis sentie perdue et je suis tombée sérieusement dans des réflexions déprimantes.

Je suis allée chez mon directeur de recherche, un chercheur célèbre. Je lui ai demandé directement : « que feriez-vous si vous appreniez qu'en fait c'est Dieu qui a créé l'Univers, et il l'a fait, par exemple, en un jour ? » Mon professeur a réflechi sérieusement quelques instants et a répondu : « J'aurais abandonné la cosmologie. Mais, d'où est-ce que je pourrais l'apprendre ? »

C'est vrai, d'où ? J'ai pris cette idée et l'ai fait mienne, j'ai réussi à me fabriquer une explication conciliant le créationnisme et les méthodes scientifiques.

J'adopte le postulat que Dieu est une essence de nature irrationnelle. Sinon, on pourrait le concevoir par les méthodes scientifiques, et alors la conception de Dieu perdrait son sens, car Dieu devient isomorphe aux lois de la nature. Dieu, étant donc irrationnel, ne peut pas être conçu par les méthodes scientifiques.

D'ici, avec une certaine approximation, je déduis un autre demi-théorème demi-postulat : la science ne peut pas prouver ni que Dieu n'existe pas, ni qu'il existe. Dans le cas contraire, la science devrait concevoir la chose irrationnelle, ce dont elle n'est pas capable par définition.

Il en résulte que nous nous pouvons nous détendre. On peut étudier les premières secondes de la vie de l'Univers, l'évolution des espèces et toutes les choses que nous aimons tant. Entre-temps, c'est bien possible que le monde soit créé par Dieu en 1, 2, 3, 7 ou 138 jours. Mais nous ne le saurons jamais.

01/10/2019

L'exposition de Toulouse-Lautrec

Sur ses peintures, les femmes ont l'air plus fort, les hommes sont plus dépravés. Sa peinture "La blanchisseuse" est accrochée au mur dans l'appartement de ma grande mère, une femme russe très éloignée de Paris du temps de Toulouse-Lautrec. Sa vie, son œuvre et sa vision, sont exposés au Grand Palais. Je suis allée au vernissage.


Il n'y avait pas beaucoup de monde, au vernissage. Peut-être parce que Toulouse-Lautrec était un peintre original. Mais, à mon avis, au cours de sa courte vie, il a formé son style, propre et unique.


C'est la première fois que je vois ses peintures en vrai. Pendant ma visite, j'ai pu constater que dans la manière de Toulouse-Lautrec il y a beaucoup d'impressionnisme.

J'appellerais son style l'impressionnisme du mouvement et des émotions.

L'impressionnisme des émotions c'est d'empoigner de l'humeur, de l'émotion, d'imprimer avec des traits un état instantané et glissant, un regard. Toulouse-Lautrec ne crée pas une toile, mais une impression, grâce à laquelle tout devient clair pour nous.

L'impressionnisme de mouvement, c'est comme chez Degas. C'est de transmettre un moment de mouvement en utilisant des traits et des lignes négligentes, c'est une impression de mouvement. Un bon exemple est la série de portraits de Loy Fuller, qui danse. Qu'est-ce que vous voyez dans ces peintures ? Moi, je vois le mouvement de couleur. Un autre exemple - de nombreuses peintures de femmes dansant au cabaret.


Henri de Toulouse-Lautrec, "La Loïe Fuller aux Folies-Bergère"
En fait, il y a plus en commun entre Toulouse-Lautrec et Degas. Tous les deux aimaient la grâce des chevaux. Bien sûr, ils sont idéals pour s'empreindre le mouvement. Et plus, tous les deux se passionnaient pour la peinture japonaise.

Pourtant Toulouse-Lautrec, à sa manière unique, a pris quelque chose de peintres différents. Il a peint le portrait de son ami Van Gogh, et pour le faire il a adopté la technique des traits séparés de Van Gogh parce que cette technique lui a permis de mieux reproduire un mouvement capturé en vol. Sans surprise, cette technique lui plaise tellement qu'il l'utilise après, par exemple, dans la peinture "Gueule de bois".

08/10/2019

Human Learning

Beaucoup de monde aujourd'hui au Centre Culturel Canadien.

C'est le temps de l'art numérique. Les artistes présent ici ce soir se mettent, sans crainte et en connaissance de cause, aux nouveaux outils pour créer de nouvelles formes artistiques. Et ils nous invitent à apprendre.

Commençant par son titre Human Learning, cette expo est le meilleur moyen pour tacher de comprendre le moment historique que nous vivons maintenant. Un rappel – Hein, regardez! On a créé autour de nous plein d'êtres auxquels nous nous sommes habitués et que ne remarquons même plus. On les approche avec une attitude utilitaire. Un rythme de vie rapide et le progrès technologique impétueux nous mènent à ce que nous ne remarquons ni nos nouveaux "amis et collègues", ni ce qu'ils nous apprennent....

Qu'est-ce qu'ils nous apprennent, les machines ? Laissez-moi vous expliquer. Tout le monde sait que les machines nous aident depuis longtemps à concevoir le monde, à l'étudier. Par exemple, le microscope, le télescope, l'imagerie médicale nous permettent de voir mieux et plus profondément la matière et l'espace. Cependant, dans tous ces cas, la machine est utilisée seulement comme un moyen, comme un outil passif.
Samuel St-Aubin
"Prosperity"
Les artistes de Human Learning ont une compréhension profonde de la réalité. Ils utilisent ou pas le machines, mais ils les considèrent comme un instrument actif de leur inspiration et, ce qui est plus important, de la création des objets artistiques. Ces artistes sont amis des machines. Ils les perçoivent comme assistantes et collègues a part entière. Et créent quelque chose de complètement nouveau.

Ils nous invitent à entrer en contact avec ce monde autour de nous et à forger un lien avec lui. De voir ce que l'homme souvent n'arrive pas comprendre de toute sa vie depuis des millénaires – le fait que nous ne sommes pas seuls dans l'univers même si cela ne semble pas vrai. Le monde est vraiment plein et riche.

Cette expo nous montre comment on peut découvrir soi-même par l'intermédiaire des machines et de l'interaction avec elles. C'est comme si on se regardait dans un miroir. C'est comme s'apercevoir brusquement que ton enfant, que tu voyais encore bébé, grandit et dit quelque chose de raisonnable.
Une grande partie de l'expo est occupée par la Science-Art, une catégorie qui devient de plus et plus populaire, bien que à mon avis ne soit pas encore très bien définie. Léonard de Vinci est célèbre comme artiste et chercheur à la fois. Maintenant, la Science-Art est comme un grand gâteau auquel les artistes et les chercheurs s'approchent furtivement de deux côtés différents. Leur collaboration me plaît beaucoup, c'est à chaque fois une nouvelle forme d'art, quelque chose qui ne ressemble pas à ce qui était fait avant. C'est pour ça que, partout dans le monde, les universités ouvrent de plus en plus leurs résidences aux artistes.

C'est peut être ici l'endroit approprié pour mentionner le but plus profond d'une collaboration entre art et science, à savoir la compréhension de la science et sa place dans le monde. C'est une chose que la science ne peut pas faire par elle même ; elle pourrait peut être le faire par l'intermédiaire de l'art. C'est un problème qui a été formule, audacieusement et nettement par Nietzsche, dans son « Essai d'autocritique », préface à la deuxième édition de « La Naissance de la tragédie » :
« Et la science elle-même, notre science, — oui, envisagée comme symptôme de vie, que signifie, au fond, toute science? »

Pendant la performance "Enigma de Purform"
Jusqu'à quel point peut l'art s'introduire sur le territoire de la science et vice-versa? C'est une question difficile. Je suis scientifique, et j'aime l'idée de contaminer l'art et la science, assaisonner la science du poivre de l'art.

«Quand on s'approprie de la connaissance scientifique - me dit Yan Breuleux - on fait cela non seulement par la pensée analytique, mais aussi par d'autres moyens. La visualisation des études scientifiques est importante pour cet "autre niveau"» pense-t-il et il rajoute dans sa performance la simulation d'un mouvement turbulent.

En ce même moment Alain Thibault, dans l'extase artistique, crée sa roboélectronique, le tout en temps réel. Aujourd'hui, il ne nous demande pas de l'aimer tendrement (Love me tender – une pièce musicale d'Alain Thibault, voire ici ), mais nous l'admirons certainement.


Post Scriptum. Je ne souhaite pas me focaliser sur "l'évolution intellectuelle" des machines et prendre Watson de IBM plus à coeur que un ampèremètre juste parce que le réseau neuronal est intégré dans le travail du premier. Laissez-moi vous raconter ceci. Dans le bureau d'ingénierie structurelle où ma grand-mère travaillait, les femmes mécaniciennes étaient beaucoup appréciées. Pourquoi? Parce qu'elles apercevaient les appareils comme des êtres "vivants", leur parlaient avec tendresse, soin. Elles traitaient une machine comme un coéquipier. Cette approche particulière aidait les mécaniciennes à rester calmes, y voir clair dans un problème mécanique et trouver une solution sans trop d'émotions ou de colère envers des choses inutiles faites en fer et fils, tout autour de nous, pendant que nous sommes tristement seuls ici. De telles mécaniciennes avaient acquis une bonne réputation, elles savaient comment trouver un terrain d'entente avec les machines. Mais ça, c'est déjà une autre histoire que je développerai dans mes articles suivants.

Moi, j'étais là
04/02/2020

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Tilda